L’ÉTAT-MAJOR DU FÉLIBRIGE
La remise d’une cigale se déroule dans un climat détendu d’amitié, au son du parler
d’Oc et dans la bonne humeur des vielles à roue, cornemuses et accordéons. Pour
autant, il se joue alors quelque chose de grave. En créant le Félibrige, l’écrivain
Frédéric Mistral sut définir en effet un implacable plan de bataille pour la survie
de la langue occitane. Et si les méthodes sont résolument douces – elles résident
sur un colossal travail de traduction et de création littéraire – l’enjeu est tel
que ceux qu’il désigne alors comme « félibres » sont certes des poètes
mais aussi des combattants acharnés dont la tâche n’est pas aisée.
Le dispositif est le suivant : Un capoulier est élu à la tête d’un bataillon de
majoraux, des écrivains de langue occitane dont l’ampleur et la qualité du travail
ont donné lieu à l’octroi d’une cigale. A chaque fois qu’un majoral s’éteint, on
dit que sa cigale est veuve et trois majoraux parrainent un félibre pour qu’il soit
à son tour élu majoral et reçoive cette cigale. C’est ainsi que Jean-Claude Dugros,
Bergeracois natif d’Agen, a été choisi par trois majoraux, Zefir Bosc de Rouergue,
Jean Fourié du Languedoc et Claude Fiorenzano, de Provence qui l’ont tous découvert
par son travail littéraire. Tout en dirigeant la rédaction de la revue trimestrielle
du Bornat , Jean-Claude Dugros a écrit « Le Bournat, école félibréenne du Périgord,
son histoire, naissance et envol 1901/1914 » et a par ailleurs traduit en occitan
des recueils du conteur périgourdin Claude Seignolle.
LA BRIGADE INTER-OCCITANE DES CIGALES
Il n’y a donc aucun népotisme entre majoraux, qui sont tous frères d’Oc sans pour
autant se connaître, mais une vraie reconnaissance du travail accompli pour la cause.
Et surtout un témoignage de confiance dans l’engagement futur du nouvel élu. La
cigale n’est pas un titre ni une distinction mais l’acceptation d’un mission, celle
de tout faire pour maintenir la culture et la langue occitane en y travaillant avec
assiduité.
Il se dégage donc de ce mouvement d’hommes du Sud à l’accent chantant une volonté
puissante, courageuse, de se battre avec des mots, ceux de leur langue pour lui
permettre de rayonner encore. Qu’à défaut d’être cette langue de culture européenne
majeure qu’elle fut il y a un millénaire, elle reste présente dans son berceau occitan.
LES CIGALES NE SONT PAS DES RÊVEUSES
Selon une étude commandée par le conseil Général de la Dordogne, 34% des Périgourdins
parlent Occitan, 54% le comprennent. L’espoir est là de lui redonner sa place dans
les écoles, ce qui comblerait le trou des deux dernières générations.
Il est certain que Jean-Claude Dugros, armé de sa cigale d’or, saura continuer à
se battre pour que l’Occitan ne disparaisse pas.
C’est lui qui traduit toute la version occitane de notre e magazine www.albuga.info
et permet ainsi à la langue des Troubadours de voyager dans le monde entier.
Sophie Cattoire
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