L'ANTÉHISTOIRE, ANTÉCHRIST ET ANTÉDILUVIENNE
Peut-être avaient-ils besoin de se cacher, car en effet cette volonté farouche d'inscrire
leurs origines dans une concrète temporalité dissipait bravement l'écran de fumée
des mythes fondateurs instaurés par les religions. Ce culte de la vérité dans une
période encore assez obscure – la naissance du fils de leur Dieu était encore, rappelons-le,
le zéro de leur calendrier – les agitait frénétiquement depuis peu. En moins de
deux siècles, leurs recherches archéologiques les avaient catapultés plusieurs millions
d'années en arrière. De quoi être quelque peu tournebizés.
Notre hypothèse est que cette dimension nouvelle les angoissait et les fascinait
concomitamment. Or, de tout temps, angoisse et fascination sont le moteur de l'évolution
chez les hominidés. C'est pourquoi ils se réunissaient non plus dans une église
mais bien sur un pic rocheux nommé "Pech Merle" pour tenter de se réapproprier l'infini
continuum de leur passé. Car si l'éternité c'est long, surtout vers la fin, ils
venaient de découvrir quelque peu ébahis que l'éternité c'est long, même au début.
SOUVENIRS NATURELS ET INTELLIGENCE ARTIFICIELLE
Chacun avait creusé à sa manière un bout de terre, un bout de temps, et apportait
là ce qu'il avait cru comprendre grâce à un collage d'images et de sons. Images
saisies sur le vif, dans la nature emplie de souvenirs, ou images fabriquées par
les premières machines utilisant l'intelligence artificielle, tributaires de calculs
très longs mais déjà en passe de traduire les images des rêves, comme nous le faisons
de nos jours aisément à chaque réveil.
À l'issue de tous ces voyages, un clan de sages se réunissait pour choisir ceux
qui auraient le privilège de repartir avec une main sous le bras. De jolies mains
évidées dans une sorte de métal fabriqué alors et sur lequel on peut distinguer
encore une signature : "André Ipiens", sans doute un Sapiens membre de cette tribu.
Des mains de ce type ont été retrouvées à travers toute l'Europe, plus ou moins
oxydées mais toujours frappées de cette même marque, attestant d'une provenance
commune.
CES FOSSILES QUI NOUS RENDENT MARTEAU
Combien de temps se sont-ils adonné à cette pratique ? Ont-ils réussi peu à peu
à reconstituer sans a priori les différentes étapes de leur évolution ? Se sont-ils
un beau jour sentis enfin tout poilus de leurs racines ? Leurs films ayant disparu
– leurs galettes d'argent ne brillent plus guère – il est bien difficile de se prononcer.
Attention, voyage spatio-temporel dans l'autre sens
Que dirons de nous les archéologues dans 50 000 ans ? Seront-ils fatigués de retrouver
par millions nos sépultures intactes en raison des quantités de conservateurs par
nous ingérésé ? Seront-ce des Martiens ? Serons-nous pour eux des créatures arriérées,
engluées dans leurs croyances et éperdues de savoir ? Des hordes de "Bouvard et
Pécuchet" telles que décrites par Gustave Flaubert, attachantes bien que résolument
pathétiques ?
Haut les cœurs ! Quoiqu'il en soit, courage fouillons ! La vérité n'est plus si
loin et au fond, notre aspiration à la retrouver est déjà en soi un chemin vers
notre libération. Oui, nous étions tous au Pech Merle dans la vallée du Lot pour
entendre retentir le cri primal du premier festival de films consacrés entièrement
à la Préhistoire : Objectif Préhistoire ! La dernière aventure moderne. Et nous
y avons passé des moments d'exception, reclus sur le talus, tous en connexion, forcément.
C'était fort, c'était chaud, c'était la vie. Vivement que ça recommence et que la
tribu rassemblée par Bertrand Defoix et Clémentine Brandéis s'agrandisse. Hip hip
hip hourra et bis repetita placent ! Il faut profiter des bonnes choses et reprendre
de ce qu'on aime.
Sophie Cattoire
Palmarès Objectif Préhistoire 2012
Toute l'équipe du festival a le grand plaisir de vous annoncer le palmarès de cette première édition d'Objectif Préhistoire :
Le Grand Prix du Jury est attribué à "L'Homme de Florès ou le conte des derniers Hobbits" de Laurent Orluc.
Le Prix de la méditation scientifique est attribué à "Les premiers européens" d'Axel Clévenot.
Le Prix de l'approche originale est attribué à "Le Messager de Lascaux" de Bernard Férié.
Le Prix du Public est attribué à "Grands maîtres de la préhistoire, le génie magdalénien" de Philippe Plailly et Pierre-François Gaudry.
Le Prix des enfants est attribué à "Tadufeu" de M.Bellamy, C.Braconnot, F. Delfortrie, J.Jamme et O.Pierre.
Deux mentions spéciales du jury ont été attribuées à :
"Les montagnes néolithiques" de Rob Hope
"Le dernier paysan préhistorien" de Sophie Cattoire.
Toutes nos félicitations aux lauréats !
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